Ça commence souvent bien un bouquin de Joseph Incardona. On se laisse prendre au jeu d'une écriture simple, fluide et agréable, le temps de poser le contexte et les personnages. On va droit au but, ça file et ça surfe. Puis, assez rapidement, le plaisant tourne à la caricature simpliste. Une femme, veuve mais battante, et son enfant, Léo, fan de surf, vivent sur la côte atlantique, dans un mobil-home, sans le sou. Juste le surf pour oublier une vie de merde. D'ailleurs, la mère est une ex-championne qui fait son deuil en fumant des joints. La dame tient une rôtisserie mobile qui perd de l'argent. Il y a des traites à payer, des prêts à rembourser et, cerise sur le gâteau, le fils est harcelé puis agressé au collège par un certain Kévin, qui se trouve être le fils de Charlotte avec laquelle travaille Anna, la mère de Léo. Puis il y a cet accident de la route, la rôtisserie out, l'assurance qui ne remboursera pas à cause du joint fumé juste avant. Rien ne va et ce n'est pas cet amour entre une mère et son fils qui sauvera les meubles. Jusqu'au Jeu, une émission absurde de téléréalité, imaginée par un chef d'entreprise. Celui qui touche le plus longtemps le bolide, d'une valeur de 50 000 €, le remporte. Léo candidate pour sa mère...
Il n'y a pas grand-chose à sauver dans ce bouquin qui tombe dans l'écueil du misérabilisme, des clichés, et des phrases toutes faites saupoudrées de quelques mots techniques sur le surf qui font couleur locale. Où est allé se fourrer Joseph Incardona ? Au pays des puissants toujours méchants —ici le patron de Renault et Madame La Présidente —habités des pires intentions, face aux petites gens forcément pauvres et pas gâtées par la vie. Sont tour à tour égratignés le cynisme et la cupidité des dirigeants, la société du spectacle, la morale des décideurs, le voyeurisme des spectateurs, etc... Quid de la dignité des individus une fois lancés dans la machine à broyer du capitalisme ? Un sujet intéressant mais un livre pénible à lire, qui ne suscite à aucun moment une quelconque émotion. Il y aurait bien quelques scènes qui tentent de relancer l'intérêt (celle du restaurant ou de la boutique de surf) mais, roman achevé, on n'aura rien retenu de cette soupe qui critique le monde impitoyable du capitalisme. Il y a bien cette femme qui tente de rester digne et, franchement, on aurait envie de partager sa lutte, ses doutes, ses impasses. Mais l'auteur ne nous en donne jamais les moyens, dans une écriture sans style aucun. Plat comme une mer sans remous, sans vague, avec des baïnes un peu partout pour noyer le lecteur. L'auteur, dans ses deux derniers bouquins, s'enfonce dans un manichéisme qu'il n'arrive plus à recycler.
Anna ne sait pas quoi faire ni comment se comporter. Cette vie est un laboratoire, un point d'interrogation : hurler, punir, chercher à comprendre ? Elle a l'impression d'être un de ces bateaux brise-glace traçant sa route au fur et à mesure, l'expérience se déploie sans aucune autre possibilité d'apprendre qu'en faisant. Et faire, dans son cas, c'est souvent se tromper.
Oui, les championnats du monde de sauna, c'était plus fun. Des Corps solides bien mous finalement. Un livre Amélie Poulain, naïf au possible et plein de bons sentiments. En même temps, la couverture présentait une portière de voiture. On passe donc notre tour sur cette soustraction des submersibles...
Les Corps solides, Joseph Incardona, Finitude, août 2022, 22€
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Une question ? Une remarque ? Une critique ? C'est ici...