La revue des professeurs de français langue étrangère
Rubrique Interlude – Poésie
Une recension en double-page avec le poème « Javier Sotomayor » extrait du recueil, p.119
Collection : Matières à Poésie
LES ÉDITIONS DU VOLCAN : https://cutt.ly/OwqjXrEw
"Le sport et sa souffrance, oubli de soi ; l’effort et le paysage, l’ailleurs. Des poèmes pour dire la foi, l’enthousiasme, dans le sport... et surtout la franche camaraderie qui en ressort. Dans ce recueil plein de légèreté, ou le travail des sons passent par des jeux de mots, des euphonies, dispositions typographiques de paragraphe en champ/contre-champ comme au tennis, Olivier Hervé poursuit son désir d’écrire l’euphorique épuisement sportif. "Spoèmes", au sous-titre si évocateur de Le sport, la vie, la poésie, est ludique célébration du plaisir d’écrire, du dépassement, souvent collectif, de soi."
La légèreté, la foi, la joie, le partage, une poésie populaire, une spoésie du coeur... Un grand merci à La Viduité, ça fait chaud au corps d'être lu avec une si grande attention ! La chronique complète ici :
« Pédaler est un combat ». Olivier HERVÉ le démontre avec un grand talent littéraire tout au long de ces 230 pages. Retour attendrissant sur la jeunesse où l'auteur découvre les joies du vélo, se remémore ses premiers tours de pédale comme pour nous faire partager sa première madeleine proustienne. Un goût subtil dans le style, non pas celui du coureur arque bouté sur sa machine, mais bien celui de l'écrivain qui sait où il trempe sa plume : entre poésie, admiration, nostalgie et révolte, Olivier HERVÉ nous fait parcourir son amour immodéré pour le cyclisme, en spectateur mais aussi en acteur amateur aguerri.
Olivier HERVÉ est un jeune sportif dans les années 90, partagé entre rugby et cyclisme, mais ce dernier sera bien vite l'objet de son choix. Ici, loin de ne parler que de lui, l'auteur se plaît à nous faire découvrir une impressionnante palette des émotions liées à la petite reine. D'ailleurs dans la vie tout est histoire de roues : « landau, poussette, draisienne, trottinette, bicyclette, moto, voiture, canne, déambulateur, fauteuil roulant ».
Mais ce livre est aussi celui de l'Histoire : celle de la bicyclette mêlée à la Grande Boucle. Anecdotes au cordeau, sélectionnées avec choix. Ainsi ce Gino BARTALI (il ne gagnera le Tour de France que deux fois et à dix années d'intervalle, il aurait pu le remporter bien plus mais la seconde guerre mondiale était passée par là) qui faisait passer des documents secrets dans le cadre de son bicycle.
« Pédalées » est une petite « en-cyclopède-ie » : le Vel d'Hiv, dédié aux courses cyclistes, soudain transformé sinistrement en camp de transit en 1942. En moins tragique les sensations, émotions lors de l'effort, angoisses bien sûr, le tout servi dans une langue fouillée, entre poésie et documentaire cyclismo-littéraire.
Olivier HERVÉ n'oublie pas ses racines hongroises, ni ses premiers émois sur sa machine, à l'heure où il est de bon ton de jouer aux grands, d'entrer en un mimétisme grotesque avec les héros de son temps, les vainqueurs des principaux Tours, les chevaliers de souffrance. Et cette solitude sur le bitume brûlant ou détrempé, ces sensations de rupture, d'agonie, mais aussi de liberté. « J'ai l'envie sincère, je crois, de ne pas être repéré, d'enfiler une tenue d'anonyme. Alors je bouge, ni touché ni coulé, ombre de silence mue par une sourde culpabilité. C'est mon exode. Je vais là où je ne suis personne, là où je m'habite parfaitement. le relief, avec ses creux et ses bosses, est ma patrie mouvante ».
L'auteur fait preuve d'un sacré coup de pédale pour nous intéresser à sa passion, par le biais du sport bien sûr, mais aussi de l'Histoire et du social dans un assemblage de philosophie cyclopédique. Ainsi surgit la figure de la célèbre Jeannie LONGO, l'occasion pour HERVÉ de rappeler le rapport homme/femme dans ce sport, de dénoncer les attitudes machistes sentant la testostérone, la femme conspuée. Et ces portraits de deux héroïnes oubliées : Alfonsina STRADA et Fiona KOLBINGER, « fantassins de l'impossible », splendides.
Puis vient l'ambiance des courses, les supplications d'exploits d'un public connaisseur mais exigeant. Alors le dopage, les abus, les obligations de faire sauter le chrono, de se surpasser, substances illicites à l'appui. Ceci aussi fait partie du Jeu. En parlant de jeu, l'auteur n'est pas avare en jeux d'écriture, s'amusant avec les mots, les tordant, les entremêlant, avant de replonger dans une certaine introspection, celle que lui permet les heures passées seul sur son vélo.
Olivier HERVÉ n'est pas là pour sprinter, aussi il flâne avec sa plume, aucun désir de résultat, c'est avec tranquillité, calme et sérénité qu'il déroule son texte, ne change pas de braquet, malgré les instants de déroute sur certains cols infranchissables aux noms légendaires. Ce livre hybride et bienvenu est sorti fin 2021 aux éditions Lunatique. Et même si vous n'êtes pas fan de cyclisme, vous pourriez bien vous laisser surprendre par le paysage, et ne pas freiner votre lecture. Un ouvrage dans lequel l'auteur tient fermement le guidon en sachant se mettre en danseuse aux bons moments.
Très bien écrit
Escapade vagabonde du vélo, qui nous transporte dans un univers apaisant mais aussi exaltant.
Lundi 27 juin 2022
10-11-12 juin 2022
J'aurai la chance de lire des extraits de Pédalées lors du festival "Victor dans la Ville" (Rouen, 10-12 juin 2022) dédié cette année au sport et à la littérature (avec Valentin Deudon, Bernard Chambaz, Pierre-Louis Basse, Mélina Boetti, Julie Gaucher, Candice Prévost). Joie ! Et quelques photos pour ce très chouette moment :
Le 22 février 2022 :
Merci beaucoup à Radio Sensations pour l'interview accordée autour de mes Pédalées !
Interview (cliquez sur le lien)
Le 29 janvier 2022
Sur Fnac.fr :
Une envolée lyrique au pays du deux roues
Ce livre est une splendeur, tant par sa forme originale que son propos. Comme dirait Henri Desgrange, « La souffrance à bicyclette est noble, car elle correspond au plein épanouissement de la volonté. »
Le 11/01/2022
Merci au magazine 200 !
Le 31/12/2021
Un grand merci au blog La Viduité pour son billet fin et brillant sur la revue "L'Autoroute de Sable", où figure ma nouvelle Chakchouka. On y apprend toujours des choses sur ce qu'on a voulu écrire. Mes grenouilles y sont joliment cuisinées :
"Drôle de recueil de nouvelles, parfois absurdes, souvent en décalage avec le thème imposé des trois grenouilles. On retrouve dans ce deuxième numéro de l’Autoroute de Sable des écrivains qu’on aime : Gonçalo M. Tavares, Olivier Hervé, Gregory Le Floch, Antoine Bréa, Guillaume Contré. On y goûte surtout une manière de déjouer la contrainte, de pousser le lecteur à s’interroger sur la cohérence de tout recueil de nouvelles.
On répète partout que la nouvelle ne se vend pas, que le genre n’intéresse ni auteurs ni lecteurs. On assiste à une discrète contestation de ce diktat. C’est une très belle idée d’avoir l’audace de publier une revue de nouvelles, de laisser la chance de découvrir des auteurs, d’en retrouver des plus confirmés. D’interroger surtout ainsi le genre de la nouvelle, sa capacité à jouer de ses contraintes, mais aussi à se plier à son exigence d’humour, à son invention d’une chute drôle, décalé ou absurde. La pluralité pourtant des auteurs contraint à s’interroger sur la cohérence de notre lecture. Sans doute un peu à tort, en moi se développe une manière de prévention contre l’usage systématique de l’humour en littérature, la légèreté comme passage obligé. Je la vois comme une forme d’uniformisation de la parole, partant des sentiments et leur dépassement. Heureusement, les nouvelles ici s’amusent surtout de la présence/absence dont ils traitent le thème imposé. La grenouille devient alors un objet de fiction, une complexe désignation langagière d’où dérive la narration.
Pour reprendre le titre de la nouvelle de Gonçalo M. Tavares, ce qui m’a intéressé dans ce recueil est la façon dont il interroge, s’amuse donc, l’importance du langage. L’auteur du Quartier (dans une très belle traduction, comme toujours, de Dominique Nédellec et avec l’excellente idée d’en proposer la version en langue originale), reprend une de ses obsessions : quelle réalité met en jeu le langage, comment peut-on lui imposer d’autres formes. La littérature comme essence du silence… Il en découle alors une sorte de flottement, une identification en suspension. Ces trois grenouilles seraient-elles ce dont on parle ou ce qui parle. Rien qu’une inscription, le nom d’un bistro dans la nouvelle d’Antoine Brea. L’auteur de l’excellent L’instruction invite à se demander si dans nos époques confinées, le langage n’est pas seulement de dénonciation, procès à charge, accusation, lettre anonyme dont jamais on ne déterminera l’auteur. L’ami Oliver Hervé (pourquoi n’avez-vous pas encore acheté son Pédalées ?) reprend aussi cette tambouille entre objet et sujet, thème et narrateur. De la cuisine interne, en somme où les grenouilles sont une contagion (une sorte de première malédiction qui, bien sûr, ne se reproduit pas comme dans « Dans le parc » de Luc Dagonet), une sorte de récit primitif, un conte de fées. Alors, la confusion entre rêve et réalité, prose et poésie (prosaïque partant et sublime), le conte de fée et la recette contemporaine. Les grenouilles incarnent, dans leur chant, la contradictoire beauté (comme dans le très beau, au bord de l’essai et de l’hommage « Le chant des grenouilles » d’Ezequiel Alemian) de notre monde. Le visqueux aussi de « L’essai sur l’amour » de Gregory Le Floch dont j’avais tant aimé Dans la forêt du hameau de Hardt. Bien sûr, toutes ces nouvelles interrogent sur ce qu’elles donneraient une fois réunies en recueil. Terminons sur un auteur que, après avoir découvert ses traductions, nous découvrons avec un immense intérêt. Guillaume Contré signe avec « La réunion » une passionnante spéculation sur le scandale du langage son caractère reproductible, sa traduction et – comme l’auteur est aussi compositeur – sa musicalité. Les grenouilles sont comme nous, elles se réunissent, parlent pour mesurer notre capacité d’écoute, interroger l’impossible unique de toute parole. Une vraie ironie dans l’aspect renseigné, dans cette façon de refermer la nouvelle sur sa situation initiale. On espère avoir des nouvelles de tous ces auteurs et autrices.
Le 27/12/2021
J’invite aussi Olivier Hervé, auteur de Pédalées, un livre poétique, à la prose labyrinthe, impossible de ne pas penser à Julien Gracq et à ses conflagrations de mots improbables. Même si Hervé évoque lui aussi trop à mon goût l’asphalte, et trop souvent l’héroïsme des forçats de la route, il m’a perdu dans ses méandres comme doit le faire une trace aboutie. J’ai pensé à mon copain Jacques Malavieille quand Hervé écrit : « Je suis pleinement géographe depuis que je pédale. La pratique devrait être rendue obligatoire dans les études de géographie, de l’école primaire au master. Le socle hercynien de toute clairvoyance. » Jacques, ancien professeur de géologie, spécialiste de la tectonique des plaques, a souvent entraîné ses étudiants à VTT sur le terrain. Il n’y a pas pour lui de meilleure façon de comprendre l’histoire du monde. Et Michel comme Hervé seraient sans doute d’accord pour ajouter l’histoire des hommes et des femmes.
Le 15/12/2021
Merci au magazine Le Cycle pour son article dans le numéro de janvier 2022 (malgré les erreurs dans le titre du livre + nom de l'éditeur).
Le 06/12/2021
Un grand merci à Frédéric Nicolas (France 3 Normandie) pour avoir présenté mes Pédalées dans son émission du 18.30.
Une interview fleuve de 5 minutes, à la télé ! (cliquez pour la voir)
Le 25/11/2021
Bonheur d'être lu par le blog La Viduité ! Des articles toujours fouillés, intelligents. Où l'on retrouve l'esprit du labeur et de la Chouffe ! Un très grand merci.
https://viduite.wordpress.com/2021/11/25/pedalees-michel-herve/?fbclid=IwAR00IlsXjDIRYm4enHZGP7tKs2KjJIKEjnWpjAoOPzPU1WOIF3_FRXbdq-E
"Éloge vagabond du vélo, errance géographique et fictives sur tous les mouvements – gestes et rythmes ; positions et rêveries – de cette pratique sportive. Entre récits, fiction et essai, Oliver Hervé signe un texte inventif, populaire comme la petite reine, où il dessine la liberté du mouvement, le perpétuel ailleurs du cycliste et son effort comme lien avec le paysage. Pédalées ou les belles et drôles rêveries d’un cycliste solitaire.
Ici on aime les textes hybrides, ceux dont la liberté de ton donne latitude à l’égo de l’auteur, ceux où la confession n’est jamais strictement personnelle. Sur un vélo, on n’est n’importe qui, anonyme équipier dans la masse du peloton. Comme quand on écrit, voire quand on lit. La métaphore paraît poussive ? Peut-être. On a pas toujours des idées lumineuses sur un vélo, elles sont ondoyantes, parfois un rien répétitives puisque paraît qu’on ressasse pas mal, en pédalant. J’aime beaucoup cette impression d’écrits revenus d’une échappée, de pensées penchées sur le papier comme au retour d’une virée, d’une pédalée donc.
Une façon d’habiter le corps pour l’accorder au cœur, de trouver la position juste dans ce chaos de matière dont je serai la mesure en temps et en empans. Charme organique de l’arpent. La géographie en sera le décor charnel.
Un auteur c’est peut-être avant tout une géographie intime, l’écho de ses espaces du dedans et comment il traverse les nôtres. Comme sur un vélo : question de rythme. Oserait-on : une scansion de pédalier dans le style d’Olivier Hervé. Le sens de la formule et la discrète mélancolie qui s’y cache. Avouons aussi que même si nous ne partageons pas ce goût pour le vélo de routes, son aspect technique et sportive (très matos, en somme), que je reconnais dans ce livre beaucoup de références communes à celles d’Olivier Hervé. De Krasznahorkai à Bella Tarr, du Ministère Amer à Godard. Allez donc voir son blog : L’espadon. Alors, j’espère que ça vous parle aussi le vélo comme dispersion et effacement, « s’accommoder du mensonge à la recherche de la vitesse perdue », s’approprier le territoire pour mieux n’y être pas. Rouler.
En m’éloignant, je décline le monde et je le reçois. J’évite de trop l’observer, au risque d’y être nulle part. Je préfère le ressentir et m’y baigner. Je veux m’oublier et me perdre dans ses matières qui me séduisent autant que son mystère.
Un livre réussi c’est peut-être un livre qui produit, et laisse perdurer, une impression de camaraderie. On a envie d’aller de se taper un col (et une Chouffe) avec son auteur. On se surprend à partager cette fraternité du peloton, précisément parce qu’il en décrit les défauts. Pédalées c’est aussi une description sans naïveté du monde du cyclisme : son machisme ordinaire, la lutte des classes de sa souffrance, le rien d’absurdité qu’est sa grand’messe, le Tour de France. De beaux passages aussi sur le cyclisme féminin (toujours moins dur que d’accoucher), sur l’ordinaire lâcheté de s’infliger une souffrance volontaire comme pour escamoter les réelles et idiotes qui ne tardent pas à nous tomber dessus. On retrouve alors l’aspect délicieusement composite de ce texte : on ne sait jamais exactement si c’est de lui dont il parle. Intéressant quand même de plonger dans la tête d’un anonyme du peloton, coureur professionnel qui se distingue peu, qui se sacrifie pour les grands noms. L’héroïsme discret du cyclisme, jamais très loin de celui d’un auteur. Enfourchez votre bécane, lisez Pédalées.
Le 24/11/2021
Je peux mourir tranquille, l'écrivain-cycliste-philosophe Olivier Haralambon me fait l'honneur d'un article sur le site de L'Équipe/Vélo Magazine. Je suis ému, tout rouge dans la redoutée Redoute ! Un immense merci :
https://www.lequipe.fr/Velo-mag/Stories/Actualites/Olivier-herve-auteur-pedaler-c-est-produire-du-paysage/1300929
Le cyclisme et, plus largement, le vélo, suscite une abondante littérature. « Pédalées », le livre d'Olivier Hervé est une sorte de livre total, et tout à fait singulier. Une encyclopédie subjective du cyclisme.
Sans doute, il n'y a pas de sport plus intimement lié à la littérature que le cyclisme. Non seulement parce que la course cycliste, ignorant l'unité de lieu et mobilisant des dizaines ou des centaines de concurrents, a besoin d'un récit unificateur. Mais aussi parce qu'il semble bien que le seul fait de pédaler génère du langage. Même quand on roule pour s'isoler, et par conséquent avoir la possibilité de se taire, on rentre avec une odyssée à coucher sur le papier. Il y a une continuité entre l'acte de pédaler et l'art d'écrire. Pourquoi donc ?
Pédaler, se perdre, puis écrire
Pour Olivier Hervé, auteur du bel et inclassable « Pédalées » paru aux éditions Lunatiques, ce qui fait l'intérêt supérieur du vélo, c'est d'abord qu'il permet de... se perdre ! « On a beau être dans une région qu'on croit connaître, dit-il, il suffit d'une bifurcation inconnue pour basculer dans un éloignement soudain, et se sentir perdu. C'est encore plus vrai dans la forêt, bien sûr. Mais il y a un paradoxe, car d'un autre côté, à vélo on va là où l'on ne serait jamais allé à pied ou en voiture, et du coup personne ne connaît mieux le pays qu'un cycliste. Là où nous vivons, mon épouse est native du "cru" et pas moi : pourtant je connais le coin mieux qu'elle, physiquement parlant. »
Ce professeur d'histoire-géo voit donc dans le cyclisme une façon de pratiquer la géographie, de la mettre en acte. Le vélo est ce qu'il appelle un « véhicule de l'entre-deux », il ne produit pas le même paysage que la marche, la voiture ou le train.
Pays, régions, villages, terroirs... « Pédalées » regorge d'ailleurs de toponymes, presque tous hauts-lieux-communs du cyclisme : du Boischaut à la Thiérache, du Firstplan à la Planche des Belles Filles, du Quercy au Vic-Bihl ou du Poudouvre au Valgaudemar, les ondulations gourmandes de la langue compensent l'inquiétante étrangeté de la désorientation.
De fait, ces « Carnets du grand chemin » (soit dit par référence à un autre furieux écrivain géographe, Julien Gracq) évoquent tous les cyclismes et tous les cyclistes. Le cyclisme « je l'aime, écrit l'auteur, quand il parle des splendides ratés de la vie. »
Il y a la compétition et sa fureur, mais aussi la promenade, la contemplation. La célébration de l'exploit sportif y trouve son pendant dans le portrait imaginaire et mélancolique de ce coureur professionnel, retraité de trente ans. Ou dans une forme de critique sociale douce-amère suscitée par le phénomène cycliste urbain, partagé entre bobos et livreurs ubérisés, déclassés, exploités : « Je me sens pauvre et prolo sur un vélo, lumpencycliste et Nordestino. »
On y croise encore le dernier vainqueur du Tour français, « et c'est une femme, bon sang ! », en la personne de Jeannie Longo. Et l'on s'étonne, ironique et navré, des lapsus ou des actes manqués de l'institution sportive quand elle parle des femmes, de l'image dans laquelle elle les enferme en prétendant les libérer.
« Prendre sa vie en main avec les pieds »
Le texte est dense. On y plonge, et il faut du souffle. On navigue dans la page comme on remonte un peloton qui frotte. C'est dense, coloré et foisonnant : on apprend à y circuler aussi bien qu'on se laisse porter. La langue est rythmée : réfléchie et haletante, comme la course.
« Pédalées » est donc une sorte de livre total, et tout à fait singulier, sur le vélo. C'est le livre d'un géographe qui incorpore ses cartes IGN à vélo, et qui « écrit pour ralentir ». C'est aussi celui d'un enfant qui bien avant « de passer de spectateur frustré à acteur contemplatif » et de « prendre sa vie en main avec les pieds », rêvait déjà de Tour de France alors qu'il randonnait en Maurienne dans le sillage d'un père épris de montagne.
C'est enfin celui d'un homme qui, passé par le rugby et les joies de la troisième mi-temps, n'a découvert le manque qu'avec le cyclisme. Il a aussi réalisé ce vieux désir d'écrire, sans doute parce que, dit-il encore, « quand on a fini de rouler, on est plus lucide sur le monde. »
Un premier retour de lecture pour mes Pédalées, signé Raymond Penblanc sur Facebook :
Une page dédiée à mes activités d'écriture. Deux de mes textes vont paraître avant la fin de l'année 2021, un long, un court, dans des styles très différents. Un livre sur le vélo à la sauce maroilles aux éditions Lunatique, mes Pédalées. Puis une nouvelle sur trois grenouilles, dans la très belle revue L'Autoroute de Sable, qui a vu le jour cette année (2021). À bientôt !
"J'ai vu des visages sans les comprendre, sans vraiment les voir." Ou comment détourner Maurice Genevoix sans le savoir. J'ai participé en mars 2021 à l'exercice à trous proposé par l'excellente revue de poésie Catastrophes. J'ai eu l'honneur et la joie de voir ma modeste (mais enthousiaste) proposition choisie par Christophe Manon, avec celles de Maud Thiria et Anne Karen. Merci à lui et aux acteurs de la revue Catastrophes.
https://revuecatastrophes.wordpress.com/2021/05/25/signes-des-temps-2/
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