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Articles

Affichage des articles associés au libellé Israël

Nouvelles, Edgar Hilsenrath (trad. Chantal Philippe, Le Tripode)

 Voilà un peu moins de deux ans que Edgar Hilsenrath nous a quittés, laissant derrière lui une oeuvre immense, profonde et provocatrice. Il est un des rares écrivains dont j'ai lu tous les livres. Ce Nouvelles condense en 158 pages toute la saveur d'une oeuvre hantée par la mémoire de la Shoah, l'antisémitisme et le rapport à la langue qui est un des moyens pour tenter de cerner une identité. Joie et émotion donc de retrouver cet écrivain qu'on a fini par connaître intimement, tour à tour clown triste et tragédien, chroniqueur de son temps et des livres qui l'ont marqué. Il était donc possible d'écrire après Auschwitz et même de le faire dans la langue de ses bourreaux, avec dérision. Quand je souhaite faire connaître les livres d'Edgar Hilsenrath, je conseille en général Nuit et Le Nazi et le Barbier . Mais si vous ne connaissez pas son oeuvre, ce volume qui réunit ses principales nouvelles pourrait bien être le livre idéal. Elles décrivent un jeune homme p...

Beyrouth entre parenthèses, Sabyl Ghoussoub (éditions de l'Antilope)

 Si vous êtes un tant soit peu intéressé par la question de l'identité, nul doute que ce Beyrouth entre parenthèses,  signé Sabyl Ghoussoub, saura vous séduire. C'est d'ailleurs la ligne éditoriale des formidables éditions de l'Antilope : avec les yeux du roman, observer la richesse et les paradoxes de l'identité juive sur tous les continents. Soit un Libanais ici à qui on interdit de se rendre en Israël. Et c'est bien connu, il n'existe pas meilleur aphrodisiaque que l'interdiction. Alors notre narrateur, qui ne cesse de fantasmer le fruit défendu, décide de se rendre à Tel-Aviv, via l'aéroport Ben Gourion où, manifestement, on aime poser beaucoup de questions aux étrangers. Toujours un immense plaisir de retrouver les livres de l'Antilope. Ce Beyrouth entre parenthèses sait parfaitement entrer dans les plis de l'identité, ce thème universel et problématique. Ce livre au prégnant vécu nous dit que l'identité est toujours suspecte, ambigu...

Les Lumières de Tel-Aviv, Alexandra Schwartzbrod (Rivages/Noir)

Des robots en Terre Sainte, au pied du Mur qui sépare désormais le Grand Israël, dirigé par les ultra-religieux, et les Résistants regroupés à Tel-Aviv, territoire en sécession peuplé de laïcs juifs et d'arabes, pour qui le destin d'un pays a été dévoyé. Alexandra Schwartzbrod imagine un futur proche où Israël, état coupé en deux, n'intéresse plus que vaguement les Russes, nouveau parrain qui a remplacé l'Oncle Sam. Les Russes ont d'ailleurs envoyé des robots tueurs pour  surveiller la frontière et dézinguer toute personne qui tenterait de la franchir. Étonnant roman d'anticipation, au contexte original — un côté guerre froide, Berlin-Est/Berlin-Ouest en Terre Sainte — qui mélange la fresque d'un pays morcelé, orphelin d'un projet et d'une identité, les dérives de ses dirigeants en proie à la parano et à la radicalisation, et le destin "d'amoureux", de conseillers politiques, de ministres, de Palestiniens et d'un commissaire tira...

David King s'occupe de tout, Joshua Cohen (Grasset)

    J'avais placé quelques espoirs en Joshua Cohen depuis Le Paradis des autres (Le Nouvel Attila) : goût pour l'absurde, la tragédie comme farce, humour juif gentiment provoc', profonde érudition, écriture orale et poétique... Mais honnêtement ce David King s'occupe de tout, à la narration classique, est un livre raté. Ni plus ni moins. Très rapidement l'ennui a pointé le bout de son nez. Pourtant, là encore, le livre avait sur le papier tous les pré-requis. L'histoire de David King, donc, à la tête d'une entreprise de déménagement en pleine crise des subprime . Roi du box-to-box , sur tous les terrains et tous les fronts, il déménage les particuliers autant qu'il trompe sa femme et saisit les biens des mauvais payeurs. Un peu mafieux, un peu roublard, il n'évite pas le divorce ou la confrontation avec sa fille Tammy, rebelle et antisioniste, le portrait craché, mais inversé, de son père. Parti planquer un peu d'argent en Israël après son divo...

L'Ours qui cache la forêt, Rachel Shalita (L'Antilope) ★★★☆☆

 Mélancolie de l'exil, blessure du déracinement, douleur de la perte... L'Ours qui cache la forêt de Rachel Shalita chante sa petite musique de l'éloignement qui vous trouble par son absence d'explication stable ,  seule façon de donner le sentiment des abîmes de l'âme humaine. Une musique de fond qui capte l'absence d'une utopie sur des airs de conte moderne. Intrigant, ce livre de Rachel Shalita croise les trajectoires et les destins pour mieux cerner cette identité d'entre-deux — comme un non-lieu en attente — celle d'Israéliens exilés aux États-Unis et ballottés entre leurs désirs et leurs renoncements, déchirés entre leur culpabilité et leur amour. Par volonté ou contrainte, chacun recherche pourtant son chez soi. Être pleinement chez soi pour être pleinement soi-même. Ce lieu, c'est Israël, ses oliviers, sa sécheresse bienveillante, ses monts, sa guerre et son armée, comme une ombre pesante. Les États-Unis aussi, terre d'a...