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Articles

Affichage des articles du septembre, 2022

Le Coeur arrière, Arnaud Dudek (Les Avrils)

 Toujours un plaisir de retrouver la plume d'Arnaud Dudek ( Laisser des traces , On fait parfois des vagues ), encore plus quand le sujet est un appel à s'envoler. Et pour cause, Victor, jeune garçon timide au physique ordinaire, a quelque chose en plus. Un talent rare pour le triple saut, une agilité, une impulsion peu communes. Touché par la grâce mais plutôt ignorant de son potentiel, Victor va peu à peu se prendre au jeu de l'entraînement, des compétitions, des médailles et des records avant de buter sur un entraîneur un chouïa névrosé qui va lui faire perdre toute envie de tomber amoureux et de gagner des titres. À quoi bon le sport de haut niveau ? Aliénation, blessures, brimades, la vie d'un sportif pro n'est pas de tout repos... Moi aussi, Jonathan Edwards m'avait fasciné à son époque. Champion en tout (olympique, mondial, européen), le kangourou britannique avait su, par ses bonds venus d'un autre temps, attirer les projos sur sa discipline un brin

La vie poème, Marc Alexandre Oho Bambe (Mémoire d'encrier)

 Je crois qu'il n'aimerait pas, mais je pourrais tout à fait élever une statue à la gloire de Marc Alexandre Oho Bambe, à sa poésie vibrante, à son énergie et à ses tempos qui nous rendent heureux. Ses chaloupés de mots, sa danse de vers libres et libérés, sa musique envoûtante. Peu de recueils me donnent autant de joie, de plaisir et de bonheur que ceux du poète. La vie poème , c'est une chanson qu'on entend à jamais, du rap cadencé, du spoken word, du zap peace and fun et du tip top. Ça tape et ça claque, ça clame et ça slame à Grand-Bassam, ça chaleur et ça one love. Du sens et de l'engagement sur le fil d'une humanité fragile, au carrefour de l'intime et de l'univers sel.  Volontiers lyrique et fraternel, Capitaine Marc déroute pour s'adresser à ses frères humains, ses soeurs de destin, en poète qui donne de son corps, coeurs et âme, dans le feu de la foi, dans la loi du peu qui donne beaucoup, au firmament de nous m'aime, pour l'ivresse,

Totalement inconnu, Gaëlle Obiégly (Christian Bourgois)

 Bon, bon, bon... que dire de ce bouquin qui n'est pas tout à fait un roman, même pas une enquête, mais une succession de pensées sur la vie et le regard qu'on pose sur elle ? Il est question d'une hôtesse d'accueil qui entend une voix lui donner des instructions. Eh eh, mais oui, elle est possédée cette petite dame ! Et elle va tenter de se déposséder par le langage, ou un truc comme ça. On lui dit qu'elle va croiser des morts—les décès lui font toujours quelque chose, peut-être le ou un soldat inconnu, une importante affaire de déterminant, la beauté des fleurs moches, les façons de connaître par l'intellect ou l'intuition. On s'interroge beaucoup en compagnie d'Yvette et du soldat, de la mort et des images, des tombeaux. "Connaître ce que je ne connais pas", des présences dans l'esprit, vaste programme... Émerveillement ou escroquerie ? La vague impression d'un alignement de petites pensées, de souvenirs décousus où l'on appr

Clara lit Proust, Stéphane Carlier (Gallimard)

Histoire d'un basculement vers l'art, d'un véritable coup de foudre, d'un émerveillement. C'est l'histoire de celle qui vous rend beau avec son petit coup de peigne. Clara, 23 ans, coiffeuse chez Cindy Coiffure, vit sa petite vie de province avec le beau gosse JM. Elle coupe des cheveux, bavarde avec les clientes dans ce minuscule salon de Saône-et-Loire, au rythme de Nostalgie et des tranches de vie narrées. Les journées, il faut bien le dire, sont un peu pénibles et redondantes. Mais, un beau jour, la révélation, l'illumination dans la lecture. Le bonheur du côté de Guermantes. Clara a trouvé sa voix dans les mots. Sa voie sera pavée de lettres, de phrases lentes et évidentes. Car Clara, elle le sent, vit la  vie d'une fille qui ne lui ressemble pas. On avait quitté Stéphane Carlier avec l'excellent Le Chien de Madame Halberstadt (Le Tripode). Entre-temps, l'écrivain a pondu un autre bouquin chez un autre éditeur, L'enterrement de Serge (ac

Taormine, Yves Ravey (éditions de Minuit)

 Le Ravey annuel est arrivé. La carrosserie est un peu cabossée, l'aile droite avant surtout, mais le moteur est toujours rugissant. On ne se lasse pas de la mécanique littéraire mise au point par l'auteur même si, à chaque roman, Yves Ravey nous vend à peu près la même voiture. Mais quelle voiture, hein ! Le standard dans la nouveauté. Toujours connue mais jamais vraiment la même. Un peu de liquide de refroidissement, du filtre à huile, du car wash plus et un délicieux polish au goût de malabar, voilà la recette du maître. Soit un petit couple, Melvil et Luisa Hammett, sur le point de se séparer et qui tente de se rabibocher par un voyage en amoureux dans un luxueux hôtel de Taormine, en Sicile. Là-bas, en avril, il pleut et la visibilité près de la mer est mauvaise. Et Melvil tourne en boucle : passons sur les incartades, fréquentes, et les passages à l'acte, systématiques, de Luisa, notamment avec son ex-meilleur ami croisé dans une agence Pôle Emploi. Oui, passons. Les