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Matthieu Jung: principe de précaution

Bonjour à tous drogués de l'Internet, place aujourd'hui à un auteur dont le fabuleux roman est passé complètement inaperçu lors de sa sortie en février 2009. Et pourtant, vous aurez là entre les mains, une véritable pépite d'analyse sociétale sur la classe moyenne d'aujourd'hui, ses codes, ses valeurs, ses habitus et son parler : une sorte de ventre mou privé d'aspérité, constitué de gens comme il faut, veules, lâches, hypocrites, sans ambition, incultes, incapables de poser un regard éclairé sur ce qui les entoure et noyés dans la pensée unique. Dans notre société du paraître, où les dérives sécuritaires et totalitaires sont monnaie courante, Saint Matthieu Jung ausculte la manière dont les pouvoirs publics fabriquent le sentiment de peur pour mieux asservir les populations et servir leurs ambitions (politiciennes ou autres). Variations aussi sur le désenchantement, le capitalisme sauvage, l'échec de l'intégration, l'assistanat généralisé, Principe de précaution est une furieuse et grinçante analyse de notre époque. Résultat de la pensée bisounours, la société actuelle produit du vide existentiel et sacrifie le réel sur l'autel de la peur collective. Évidemment, en lisant Jung on pense à Houellebecq et à son écriture à plat, extralucide. 

Implacable et incroyablement percutant, avec une fin en trompe l’œil pour ce père de famille bien trop normal. Jung joue sur les différents niveaux de langages à la perfection (le parler jeune, le parler banlieue, le parler trader avec la précision bluffante de l'entomologiste). Roman politique et social, très drôle mais aussi effrayant, Le principe de précaution est un des grands livres de 2009, injustement ignoré. Quel dommage. Une fois commencé, impossible de le lâcher. C'est fort pour un livre qui parle des classes moyennes françaises!