« Vigile » de Hyam
Zaytoun est le récit court d’une nuit en enfer, suspendue au bon vouloir du
destin. Une nuit donc, où l’homme qu’elle aime subit un arrêt cardiaque et
sombre dans le coma. La mort qui frappe en plein cœur, sans appel. La chance de
s’en sortir est réduite à la portion congrue, les médecins n’y croient même
plus…
« Vigile » capture le
désastre à venir et sa genèse — une femme avec deux enfants et sans père —
sorte d’entre-deux entre la mort et la vie. Le deuil en son absence, en son
invisibilité, en sa possibilité, une expérience par procuration. Ce qui frappe, c’est la douloureuse conscience d’une condition
partagée. Car dans notre désir d’éternité, le livre nous rappelle sans détour la possibilité de la mort, la possibilité d'une fin avant l'heure, sans préavis. Déjà mort, encore vivant. Le témoignage, déchirant, décrit ce
qui traverse la crise, la possibilité de la perte, image impensable d’un crépuscule anticipé.
Mais surtout, il faut y lire la force du sentiment amoureux, incubateur d’espoir,
celui d’une femme qui garde la face malgré tout, toujours dans la retenue et
comme en apnée tant que la fin est indécidable (p. 109 : « Le cœur absolument
léger »).
« Oui je me sens soudain si coupable. De ne t’avoir pas protégé, pas assez aimé, pas assez regardé. Si j’avais su, est-ce que j’aurais pu ? Est-ce que l’on s’aime en s’épargnant ? Cette énergie-là, à vouloir toujours imaginer avec toi de nouveaux projets, un nouvel horizon, n’est-ce pas, depuis le début, la façon que j’ai de t’aimer ? »
L’écriture, elle, est toujours à
bonne distance : phrases courtes dépouillées de pathos, jamais mièvres, le
danger classique dans ce genre de récit. Le refus de tout effet ou artifice aussi — sa limite
peut-être — pour laisser à chaque mot le soin de raconter la peur, la douleur
et la joie retrouvée mais posée. Loin du cynisme ambiant, « Vigile »
est une vraie histoire d’amour finalement, comme on n'en lit plus. Avec de vrais
et beaux sentiments. On devrait dire purs. Un récit dur dont on ressort un peu plus vivant.
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Une question ? Une remarque ? Une critique ? C'est ici...