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Marie-Lou-Le-Monde, Marie Testu (Le Tripode)

 Incandescence de la présence, corps pyromanes et coeurs-puissances, ce Marie-Lou-Le-Monde rappelle avec la ferveur d'un vers le pouvoir des sens et la vitalité d'un sentiment ou d'une sensation à l'état de jeunesse. Les troubles de la première fois, ce qui vous ensorcèle et vous malmène, dépasse et fracasse. Le désir a besoin de déploiement et d'été, d'un lieu et d'une carte pour s'épanouir. Cette carte du désir, c'est Marie-Lou, le corps totalisant. Les envies volcaniques des premières fois, ce sont des failles sismiques intérieures, mélange d'ondes, de fourmis, de chairs et de feu. Ce roman en vers ou ce long poème est beau comme une caresse estivale, puissant comme un envoûtement charnel. Dialectique d'une présence amoureuse et d'une passion qui brûle le corps et le coeur, comme un miracle de sensualités à fleur de peau.


Des ascenseurs, des ventres qui crient, une Terre s'effondre, des regards aimantés, un souffle coupé, des chutes et des vertiges, des danses et des scènes au ralenti, des éclairs en bas du ventre, des beautés douloureuses. Marie-Lou, c'est un monde total, un visage avec des couleurs et des douleurs, de l'ocre et du Maroc dans les yeux, des saveurs et un minois enjôleur. C'est un paysage surréaliste plein de douceur, une fantaisie, une créature aux formes géométriques et rondes, des brèches et des gorges asséchées, un jean comprimé, un abandon un vertige et pourtant la narratrice, 17 ans, n'avait rien demandé à personne. Elle se sent partir au point d'être ensorcelée par cette présence magique, long fleuve de sentiments et de sensations aussi brusques que puissants, un truc qui a à voir avec l'éternité. Un tsunami de vides et de pleins, d'absence au monde qui est pure présence de l'instant, qui rappelle que le sentiment amoureux est d'abord une jouissance visuelle, olfactive, tactile, contacts de chair et de fluides, choc organique et viscéral.

"Et dans les vestiaires elle chantait, 
À poil, 
Les autres filles avaient toutes
Le visage retourné
Dans le mur opposé
Elle les avait clouées
Au mur
Elles n'existaient plus que
Comme des détails d'un tableau dont
Marie-Lou est le sujet"

Ce livre nous rappelle la force des premières fois, leurs héritages et leurs deuils inévitables, la passion en ses déchirements et ses brûlures. Une épaule dénudée, un regard lointain, l'absence d'un soutien-gorge pour faire naître des mirages de sensualité et rendre aveugle pour l'éternité. Moins une présence parfois qu'un concept de beauté parfaite et une façon de cristalliser des fantasmes. Texte d'une envoûtante fluidité, éruptif et langoureux, qui capte l'adolescence en ses plus beaux détachements et étincelles. Grand plaisir de lecture.

                                                                                                                                                                      

Marie-Lou-Le-Monde, (première fois narrative de) Marie Testu, Le Tripode, février 2021, 116 p., 13€

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