Convergence des luttes altermondialistes ou anti, convergence des gauches anticapitalistes à Gênes, en 2001, au sommet du G8. Répression et violence policière, ville muselée, anarchistes et black bloc dessinent en creux des paysages de combat, des espoirs noués au chaos, autant guidés par la foi en un autre monde que par les illusions qu'ils trahissent. Utopies et principes de réalité à Gênes au son de la colère, le XXIe siècle a peut-être commencé à Gênes, avant l'effondrement des Twin Towers, semble nous dire Frédéric Paulin (La Fabrique de la terreur). Wag et Nathalie, couple embarqué dans les vagues de manifestants (500 000), aux côtés de journalistes, de groupes noyautés par les flics ou des services de renseignement vont subir l'enchaînement tragique des faits. En face, des hordes policières prêtes à tout, des dirigeants politiques jaloux de leurs pouvoirs et bien décidés à mater la rébellion. Une question de principe et de jeu politique (Chirac, Besancenot et Krivine apparaissent notamment). De calcul mortifère.
Tu vois ce mec ? Il s'appelle Mirko et il est prof de philo à Belgrade. Tous les réformistes, les journaleux de gauche le feront passer pour un taré sans conviction politique. Putain, il peut te parler de Nietzsche ou de Heidegger pendant quatre heures sans se répéter, et eux, ils le considèrent comme un abruti assoiffé de sang.
Au-delà de la violence légitimée, le roman est un moyen pour l'auteur de révéler les atteintes au droit, les opportunismes de tout poil, les duplicités et les petits jeux de pouvoir, dans l'entourage de Chirac notamment, lorsque Lamar, son officielle plume (fictive), est rattrapé par son histoire personnelle et les guéguerres au sein des services. On instrumentalise le désordre, on flippe du chaos et de la peur transformée en une violence sans frein. Mais à la fin, ce n'est qu'une question de survie, chacun cherche à sauver sa peau, qu'importe le côté de la barrière où l'on se trouve. Un livre qui maintient l'intérêt vif et sans forcer par son rythme, ses points de vue, son érudition et sa façon de ne jamais s'enfermer dans des postures caricaturales.
La Nuit tombée sur nos âmes, Frédéric Paulin, Agullo, septembre 2021, 280 p., 21,50€
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